- Hé ! Bientôt le temps des voeux, des "on te souhaite quoi la réussite l'argent le brillant"... Ecoutez plutôt Chaussinette, il va vous conter une chanson en patois dauphinois que rapportait Auguste mouthier dit "Lo gueuste" en 1907.
Mon père étiait' un bien brâv' hômme,
I me disiait sovein : Garçon,
Si jamai lo mâlheur t'assômme
Raidi-tè tojour et teint bon,
Fau pâ tro révâ la richessi,
Lo gran repô et lou plaisi,
Mais si t'écôte la sagessi
Te moderarai tou dési.
Si te te conteinte de poù
Te sarai certain d'eitre hérou
Quand t'u tour de mi je regardo (quand autour de moi je regarde)
Le gein que se plegnon tojour (les gens qui se plaignent toujours)
Je lou z'écôte et bien me gardo (je les écoute et je me garde bien)
De rien repondre à leur discour. (de ne rien répondre à leur discours)
L'un di : Je seu tojour malâdo, (l'un dit : je suis toujours malade)
Mon migié ne po pâ passâ, (mon manger ne peut pas passer)
Mais din lo timp, lo camarâdo, (mais dans le temps, le camarade)
Tou lou jour faisiait siei repâ. (faisait tous les jours 6 repas)
Si s'étiait conteinta de poù (s'il s'était contenté de peu)
Sariait en santé bien hérou. (il serait en santé bien heureux)
Un'autro di : Ma fena brâme (un autre dit : ma femme brâme - râle)
Quan t'ei le me vei lo nâ co (quand elle me voit le nez... cuit (?))
Maugré tien ei di qu'eile m'âme, (malgré ça elle dit qu'elle m'aime)
Mais je n'en creyo pâ un mo... (mais je n'en crois pas un mot)
Si se teniait à son ouvrajo (s'il se tenait à son ouvrage -travail)
Ne beviait pâ si sovein po, (ne buvait pas si souvent)
Sa fena fariait pâ tapâjo (sa femme ne ferait pas de tapage)
Et leu sariait bien tranquilo (et lui serait bien tranquile)
Si ne voliait beire qu'un poû (s'il ne voulait boire qu'un peu)
Son ménajo sariait hérou. (son ménage serait heureux)
Queu marchan à bonna franquéta
N'a que sa fena pe commi,
I veind beaucou; su son empléta
Ne prein qu'un to peti profi,
N'a pâ gran frai, mais sovein gâgne,
I ne fa pâ de zambarrau ;
Pou-à-pou u ma de cocâgne
Atrâpe lo prix lo plus beau.
Joèno s'eit conteintâ de pou
Devenu vieu i l'eit ' hérou
Jean vodriait se mâriâ, fouéta
Qu'i l'eit pressia, mais z'i l'attein
D'avei una fena parfaita
Qu'ayèze surto bien d'argein...
L'aigua que côle de la sourça
Dedin la mer va se jetà
Et l'argein va dedein la boursa
Où gn'yan' a beaucou d'amassâ.
Si s'étiait contientâ de pou
Lo Jean auriait pu eitre hérou.
Jôset din son villâj ' eit maire
De to lo mond ' eit écotâ,
Totet se z ' idé sont si claire
Qu'i n'a pâ à le repetâ.
I vout parlâ, idé bien fôla
Dan de z ' endret plus z'élevâ.
On se moqui de sa parolâ,
I n'en poeissise relevâ.
Si s'étiait conteintâ de poù
U villâj ' i sariait hérou.
Moncieu Richar eit millionnairo (monsieur Richard est millionnaire)
A de maison, de boei, de prâ, (il a des maisons des bois des prés)
Mais z'y peinse, à son ' ordinairo, (mais il pense d'ordinaire)
Que li faut tot ' accaparâ ; (qu'il lui faut tout accaparer)
A tripotâ din de z ' affâre (il a tripoté dans des affaires)
Où l'honnéteta n'étiait pâ ; (où l'honnêteté n'était pas)
A forci de fâre et défâre (à force de faire et de défaire)
Sa fortuna a cupelâ. (sa fortune a chuté)
Si s'étiait conteinta de poù (s'il s'était contenté de peu)
tranquilo i sariait hérou. (tranquille il serait heureux)
Quauque fei je dio de bêtise (Quelques fois je dis des bêtises)
Que j''écriv ' en notron patoi, ( que j'écris en notre patois)
Qu'on le z'ignôre ou qu'on le lise (qu'on l'ignore ou qu'on le lise)
Tien ne me baille pâ d'émoi. (ça ne me donne pas d'émoi)
Si je volem fâre de scienci (si je voulais faire des sciences)
De mi on poriait se moquâ, (de moi on pourrait se moquer)
Je me conteint' en ma conscienci ( je me contente en ma conscience)
De fâre rire et pâ plourâ. (de faire rire et pas pleurer)
En to me conteintant de poù (en tout me contentant de peu)
Je seu to simplamein hérou. (je suis tout simplement heureux)